On est en Anatolie, terre d'une beauté désespérée. Tout commence au bord d’un gouffre, gouffre face auquel Emre paraît si petit, totalement impuissant, et résumant d’entrée ce que sera sa place, sa condition. Jeune procureur idéaliste, nommé dans une petite ville reculée de Turquie, il va très vite se heurter, et sa morale avec, aux notables du coin dans une sombre histoire mêlant élections, pénurie d’eau, viol et rumeurs d’homosexualité.
Les films les plus effrayants ne sont pas toujours les films d'horreur. Ici, l'effroi naît du spectacle d'une populace en proie à une haine aveugle. On sent la foule gronder comme un animal menaçant et la haine monter par vagues comme un raz-de-marée.
Le film séduit par sa finesse psychologique et une angoisse distillée goutte à goutte comme un venin. Une belle réflexion sur la bêtise de la foule, l'étroitesse d'esprit de la province et la haine de l'autre. C'est un film fort, envoûtant, anxiogène, une allégorie de la Turquie actuelle sous le joug de son dictateur.