Plantons le décor : l’URSS touche à sa fin, le rationnement perdure et les coupures d’électricité sont courantes. De cet environnement la caméra ne nous montrera jamais d’éléments réels, préférant mettre en avant l’imagination de ses personnages tout en critiquant les idées du régime. Léna et son fils Potato vivent comme ielles le peuvent, ne rentrant pas vraiment dans les cases qu’on leur a assigné. Leur quotidien est entrecoupé de pressions quotidiennes de la part de son supérieur pour Léna et des brimades homophobes de ses camarades pour Potato. Mais la confiance et l’amour qui’els entretiennent l’un·e pour l’autre les motivent pour trouver un moyen de fuir l’austérité de ce pays, quitte à se marier à distance avec un américain. Pourtant ce n’est pas dans la résignation que ce choix s’opère mais dans l’exhaltation. En effet les personnages sont énivrés par cette opportunité de vivre leur rêves, voir juste de vivre tout court, car bien conscients de leurs conditions actuelles. Une fois atterri au pays où tout est possible, le décalage de ses personnages se jouera sur le terrain de l’intégration et sous la menace de devoir retourner en Russie.
A défaut de nous dépeindre un environnement réaliste, Wes Hurley utilise les outils qu’il a sa disposition pour raconter sa propre biographie d’un point de vue satirique. Les choix de mises en scène sont ludiques et décalées, apportant une légèreté dans un quotidien âpre et sombre. De même sa manière de filmer se modifie entre les deux parties du film, stimulant la narration et dépeignant ainsi deux ambiances bien distinctes. L’homosexualité et l’immigration sont traités avec justesse et délicatesse sans virés dans le pathos. En somme, un film généreux et optimiste qui montre l’évolution de deux personnages attachants qui prennent en main leur vie par des choix qui certes bouleversent leur quotidien mais les amène à s’émanciper.